CONFÉRENCE GRAND PUBLIC
Mercredi 22 mai
19h00 - 20h00
Amphithéâtre Alain Guille
Source, transfert et devenir des macro et micro-plastiques à l’interface terre-mer :
Cas d’une zone d’étude pionnière, le littoral des Pyrénées-Orientales
Résumé:
Lors d'une première thèse (Mel Constant, 2015-2018) au CEFREM sur l'aspect source-to-sink des micro-plastiques (MPs) dans le Golfe du Lion (GdL), nous avons pu établir un premier bilan numéraire et massique des apports d'un fleuve typique côtier méditerranéen : la Têt. Fort de cette expérience basée sur l'étude de terrain, nous avons développé une approche modélisatrice sur ces transferts continent-océans des MPs et sur le devenir des MPs en Méditerranée (thèse de Lisa Weiss, 2021).
Cependant, le questionnement sur l'origine de ces MPs marins nous a rapidement fait prendre conscience de l'importance des macro-déchets plastiques lessivés par les pluies dans les bassins versants, comme source de MPs par fragmentation mécanique et photochimique. Pour réduire efficacement la quantité de MPs dans les océans, nous devons donc réduire la quantité de macro-déchets plastiques qui transitent dans les bassins versants. Un deuxième axe d'étude s'est donc développé sur les flux de macro-déchets continentaux déversés en mer par les fleuves. Nous avons ainsi créé en 2020 le projet REDPLAST66, qui associe la recherche institutionnelle (le CEFREM) avec une association environnementale de bénévoles luttant contre les déchets sur le littoral du département depuis 20 ans (CITECO66) et 2 petites PME locales (Seaneo et Nostra Mar). Ce projet nous a permis de définir des flux massiques annuels de déchets plastiques flottants déversés en mer par la Têt, de définir des scénarios de transfert et de proposer aux gestionnaires des espaces publiques naturels des solutions simples et économiques pour réduire ces flux.
Malgré toutes ces années sur le terrain, de nombreux verrous méthodologiques subsistent. Parmi ces verrous, j'aborderai trois axes développés actuellement :
1) Quid des flux en période de crue ? Les crues méditerranéennes sont rares mais extrêmement intenses. Les prélèvements manuels et observations visuelles ne peuvent être effectués lors de ces périodes dangereuses. Une station de pompage automatique permettra de travailler sur les prélèvements pour les MPs. Pour les macro-déchets, nous développons un nouveau mode d'acquisition de données en continu par l'intermédiaire d'une caméra hyperspectrale.
2) Quid des flux par les déchets charriés par le fond ? L'estimation des flux annuels de déchets plastiques par la Têt est forcément sous-évaluée dans la mesure où nous ne comptions que les déchets flottants, de surface, donc visibles. Depuis 2024, nous travaillons sur les flux de déchets plastiques, plus denses et donc charriés par le fond de la Têt.
3) Quid des déchets flottants disséminés en pleine mer ?
Depuis quelques années, nous travaillons également au CEFREM à discriminer à l'aide d'une caméra hyperspectrale les déchets plastiques dans toute leur diversité des autres matériaux naturels flottants (ex : bois, algues, ...), et ceci en intégrant les interférences potentielles des processus de vieillissement des déchets plastiques en mer (photo-oxydation et biofouling). L'objectif de ce projet, soutenu par la Fondation Van Allen et le Centre Spatial Universitaire de Montpellier (CSUM) est de lancer dans les années à venir un nano-satellite dédié à la surveillance des macro-plastiques flottants en mer.
Philippe KERHERVÉ est enseignant-chercheur à l'Université de Perpignan Via Domitia. Il travaille au Centre de Formation et de Recherche sur les Environnements Méditerranéens (CEFREM).
Son travail se concentre sur le transfert et le destin des matières organiques particulaires (MOP), des microplastiques (MP) et des déchets marins dans un système côtier, depuis les sources jusqu'aux zones de dépôt.